par Claude Queval, 21 mars 2021
Ne saviez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires de mon Père ?
Luc 2.49
Bonjour à tous,
Heureux de vous retrouver aujourd’hui sur fond de Pâques et de réunion annuelle pour notre communauté. Il faut bien le dire, nous sommes sur un chemin qui s’étire et se coupe au gré des aléas d’une pandémie qui pourrait, si on la laissait faire, nous paralyser. Nous avons parfois intégré cette paralysie, cette façon de dire que nous ne pouvons pas nous projeter dans l’avenir. Au seuil de notre réunion annuelle, nous sommes en train de nous demander ce que nous avons réellement mis au monde cette année, ce que nous avons fait de ce temps, mais aussi ce que nous pourrons faire demain.
Difficile de se fier à l’intelligence, de poser les bonnes questions et d’obtenir des réponses alors que tout semble incertain, remis en question semaine après semaine et parfois jour après jour. Nos habitudes sont perturbées. Un grand nombre de nos projets sont suspendus, et nos rapports sociaux sont quelque peu contrariés, parfois rendus impossibles. Sur la route de nos routines, un virus est venu tout détraquer et déranger dangereusement notre insouciance.
Et pourtant, même si cet épisode de perte de repère nous nous a suggéré que nous pourrions être passés à côté de l’essentiel de notre vie dans beaucoup de domaines, nous sommes là, ce matin, fidèles au rendez-vous pour célébrer Notre Père, bien qu’il soit difficile de donner corps à cet amour fraternel qui nous unit.
Nous serons encore là cet après-midi, pour faire le point et donner forme à nos rêves, pour découvrir un avenir au bout de ce chemin difficile, alors que nous voudrions oublier cet épisode frustrant de notre vie personnelle et collective.
Nous sommes poussés par l’Évangile à rencontrer le Père là où il nous attend pour que nous nous occupions de ses affaires.
Pandémie ou pas, la vie est faite de hauts, de bas, d’obs¬tacles à surmonter et de défis à relever, mais aussi de bonheurs à vivre et de joies à célébrer.
Comme le dit le pasteur Bruno Picard : « Ne pas se prépa¬rer, c’est se préparer à vivre un échec ! »
Sommes-nous prêts pour cette nouvelle saison amorcée par la réunion annuelle ?
De quoi s’agit-il ? Qu’est-ce que notre communauté a de spécifique ?
Dans beaucoup d’associations, il existe une fraternité. Le drame de notre époque, c’est qu’on veut une fraternité, mais, sans Père. Un Père qu’il faudrait tuer symboliquement pour passer outre son image d’autorité, afin de s’affirmer et trouver sa place… C’est ce que les psychanalystes ont dit des Français de la révolution quand ils ont tué le roi, figure du père… et pourtant, avec la montée du populisme et des dictatures, les êtres humains continuent désespérément de se chercher un père…
Plus dramatique encore, quand les croyants veulent une paternité sans fraternité, sans être fils ou fille du Père sans être frères ou sœurs des autres enfants.
Quand nous reviendrons en présentiel, nos chaises, à l’église ne seront pas des isoloirs, lieu de notre méditation… solitaire !…
Alors ?… Solitaire ou solidaire ?
Pour être frère ou sœur, il nous faut d’abord être fils ou fille…
Ouvrons les Évangiles :
Notre Père, ouvre notre cœur et notre intelligence à la lecture de ces textes.
Dans l’Évangile de Luc au chapitre 2, sur le chemin du retour d’un voyage à Jérusalem, les parents de Jésus s’aperçoivent qu’il n’est plus avec eux. Quand ils le retrouvent enfin, Jésus semble se trouver là où est sa place, dans la maison de son Père, à s’occuper de ses affaires comme un héritier digne de l’héritage qu’il a reçu.
Jésus n’a que 12 ans, mais son esprit est déjà focalisé sur la gestion des affaires de son Père !
À sa mère biologique et à son père adoptif, qui l’ayant cherché avec inquiétude viennent de le retrouver dans le Temple, il demande : Ne saviez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires de mon Père ?
Plus tard, alors qu’il est engagé dans son ministère public, il ne se lasse pas de parler à ses disciples de son Père : « Toutes choses m’ont été remises par mon Père. » « Mon Père agit jusqu’à présent, et moi aussi j’agis. »
« Dieu m’a envoyé dans le monde. Ma nourriture, (Ma viande) c’est de faire ce que Dieu veut et de réaliser jusqu’au bout le travail qu’il m’a donné.
Jean 4.34 (version parole de vie)
Avec quelle émotion ses disciples les plus intimes l’ont-ils entendu prier son Père : “Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi.” “Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font !”
et ces dernières paroles que tant de chrétiens ont offertes à Dieu à l’heure de la mort : “Père, je remets mon esprit entre tes mains.”.
Mais quelles sont-elles ces affaires du Père dont Jésus est héritier ?
Nous avons la réponse dans l’Évangile de Luc au chapitre 4, quand, adulte, Jésus est invité à commenter la loi dans la synagogue de son village :
Jésus se rendit à Nazareth où il avait été élevé et, conformément à son habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat. Il se leva pour faire la lecture, et on lui remit le livre du prophète Ésaïe. Il le déroula et trouva l’endroit où il était écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a consacré par onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres ; il m’a envoyé [pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux prisonniers la délivrance et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour proclamer une année de grâce du Seigneur.
Ensuite, il roula le livre, le remit au serviteur et s’assit. Tous ceux qui se trouvaient dans la synagogue avaient les regards fixés sur lui. Alors il commença à leur dire : “Aujourd’hui cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, est accomplie.”
Cette volonté du Père pour Jésus son Fils se décline comme suit :
Le Père a voulu que ses créatures reviennent à lui alors Jésus a annoncé l’évangile de réconciliation.
Le Père a voulu que ses enfants aient accès à sa grâce, Jésus a proclamé la grâce du Seigneur et il s’est donné corps et âme pour que la grâce soit accessible.
Le Père a voulu que ses créatures soient délivrées, que leurs péchés soient pardonnés et effacés, Jésus s’est donné à la croix pour que cela soit rendu possible.
Jésus a donc travaillé sans relâche pour rétablir le règne de son Père sur la terre jusque’à son dernier souffle sur la terre : Tout est accompli… Mission accomplie !
Jésus a agi et il agit encore aujourd’hui par toi, toi qui es le fils, la fille, l’héritier, l’héritière de Dieu, du Père céleste.
Ainsi tu n’es plus esclave, dit Paul aux Galates , mais fils ; et si tu es fils, tu es aussi héritier de Dieu par Christ.
Galates 4.7
Que dire de ce Père qui, décrit par Jésus dans cette histoire du fils prodigue, donne à son fils irresponsable son héritage avant le temps, prenant le risque qu’il le gaspille… et qui l’accueille avec tant d’amour, de pardon et de joie, quand il revient après avoir dilapidé cet héritage et gâché en grande partie sa vie…
C’est ce Père-là qui nous accueille encore aujourd’hui, avec nos succès et nos échecs, avec notre fidélité et nos infidélités… notre héritage préservé, notre présence et notre service fidèle comme le fils ainé de la parabole ou nos poches vides, notre désertion et notre absence comme ce fils prodigue qui revient piteux… rebrousser chemin pour retrouver Papa…
A chacun de ses fils, à chacune de ses filles, Dieu le Père a confié un héritage, une mission :
Comme le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. Après, il souffle sur eux et dit : Recevez le souffle saint.
Jean 20.21
Quelles sont les affaires de Notre Père dont nous sommes héritiers ?
Ce chemin d’insouciance de Marie et de Joseph qui repartent de Jérusalem avec le sentiment du devoir accompli dans ce rite de la fête de Pâque et qui en perdent jusqu’au souci de leur fils, ce chemin nous parle d’un chemin sur lequel les choses du Père sont abordées. Ce chemin nous parle de l’habitude des êtres chers qui ne se voient plus, à force de se voir chaque jour. Cette rencontre nous parle aussi de l’arrêt brutal du cheminement de l’habitude et de la nécessité de revenir sur ses pas et de mesurer ce qui compte vraiment pour nous.
Pour parler de cet amour qui le fait vivre, Jésus utilise le mot de “Père”.
Ce Père, Il est Père parce qu’il suscite la vie de son fils, de ses fils et de ses filles. Il suscite en nous une vie libre. Une vie qui n’est pas prise dans les chaînes de toutes les limites naturelles, une vie qui transcende toutes ces limites, y compris d’une pandémie. Dieu est Père parce qu’il offre par amour à ses enfants la liberté d’être, un horizon, donc un avenir !
Avec tous les possibles qui sont devant eux, avec toutes les promesses que la vie offre. Un Père qui libère. mais un père qui au contraire encourage à vivre libre et qui offre une loi pour montrer son amour, une loi qui empêche de se perdre, une loi qui ramène sans cesse à l’essentiel : l’amour de Dieu et l’amour des autres.
Pour nous, il existe un Père qui nous aime et qui existe au-delà de ces entraves avec lesquelles nous vivons aujourd’hui. Il nous libère pour que nous puissions nous occuper de ses affaires. Des affaires d’amour, de fraternité, de solidarité, des affaires de foi en Dieu.
Le Père veille sur nous, ses enfants. Alors, dans cette approche de Pâques et de réflexion communautaire, que ce soit le temps de la résurrection d’un amour en chemin, le temps où tous les enfants bien-aimés du Père pourront accomplir ses affaires étonnantes…
Nous avons une entreprise familiale à faire grandir : l’entreprise de l’amour, l’entreprise de la grâce, l’entreprise de la paix, l’entreprise de la sainteté.
Nous sommes conviés à faire connaître Dieu, Notre Père et son œuvre de Salut. Et surtout à vivre cette Bonne Nouvelle là où il nous a établis.
Autour de nous, il y a tant de gens qui ont besoin de consolation, de restauration. Tant de gens qui ont besoin de l’amour que le Père procure. Tant de gens qui ont besoin de savoir qu’il veut les guérir de leurs blessures émotionnelles, les restaurer.
Notre Père nous invite à nous former, comme Anne vient de le faire et plusieurs autres dans notre communauté, à développer et utiliser nos dons, nos talents, notre énergie, pour le servir.
Notre Père nous invite aussi, en son temps, à passer le relais, à transmettre à la relève :
Ce concept n’est pas nouveau. Déjà, Paul, qui voyait au-delà de lui-même, a instruit Timothée, puis, vieillissant, lui a donné la directive de préparer des personnes à de¬ve¬nir res¬pon¬sables d’églises, lorsqu’il lui dit :
“Ce que tu as entendu de moi en présence de nombreux témoins, confie-le à des per-sonnes fidèles qui soient ca¬pables de l’enseigner aus¬si à d’autres”
2 Timothée 2.2
Prions :
Notre Père, nous te remettons nos vies, avec toutes les joies que nous y trouvons et aussi les peines.
Bénis tous ces liens, toutes ces relations qui nous font vivre et qui disent qui nous sommes.
Bénis, Père, toutes ces alliances passées dans nos existences, nos amitiés, dans tout ce qui fait que nous sommes humains ensemble.
Éclaire, Père, ces cheminements intérieurs qui nous permettent de revenir sur nos vies et d’adoucir toutes les embuches, d’aplanir nos chemins et de nous donner le courage et la force de continuer à marcher en solidarité.
Nous te demandons, Père, ton soutien et ton secours, pour tous ceux qui vivent dans l’angoisse, tous ceux qui sont dans les angoisses de la maladie, tous ceux qui sont dans les angoisses professionnelles, tous ceux qui ont peur pour leur avenir.
Père, aide-nous à être là pour qu’ils tiennent bon, aide-nous à ouvrir des horizons devant eux, tous ensemble.
Nous te demandons, Père, ton soutien, ton amour, ta lumière.
Éclaire, Père, ces cheminements collectifs dans notre communauté et en particulier lors de notre réunion annuelle pour que nous trouvions, ensemble, les meilleures façons d’accomplir notre mission et de nous occuper de tes affaires.
Nous te prions, Père, pour accroître notre solidarité les uns envers les autres, pour nous permettre de trouver toujours le bon chemin pour rejoindre ceux qui ont besoin de nous et pour nous laisser aider quand nous avons besoin des autres.
Et, ensemble, comme des enfants qui se confient à leur père, en toute confiance, nous te disons : ABBA… PAPA !
Amen !
Présidence
Michel Mondou
Direction des chants
Cédric Bitemo
Prédication
Stéphane Rhéaume